Chapitre de Mère Pierre Marie du 15 octobre 2021, RB 12

Ce matin, la Règle s’intéresse aux Laudes du dimanche. Nos propres Laudes s’en inspirent beaucoup. Mais nous pouvons nous laisser surprendre en découvrant le psaume 50 dans les Laudes du jour du Seigneur, Jour de la Résurrection, et de plus avec alléluia !

C’est ce psaume 50 que je vous invite à méditer pour notre temps de prière, en union avec la situation douloureuse que vit notre Eglise et surtout la souffrance de tant de victimes ; il ne faut sans doute pas trop vite atteindre déjà le bonheur de Sion et voir relevés les murs de Jérusalem. Comme le recommande la CIASE, il est nécessaire de prendre le temps d’écouter ce qu’ont pu vivre ces personnes vivement blessées dans leur chair, meurtries dans leur dignité ; pleurer avec elles, pleurer avec l’Eglise qui n’a pas su prendre la mesure du mal et est restée sidérée. Prendre le temps de demeurer avec un cœur brisé et broyé. Rejoindre ainsi ceux et celles dont la vie a été broyée, brisée.

Nous savons le contexte de ce psaume 50 attribué à David, suite à sa faute avec Bethsabée et le meurtre inique et habilement masqué d’Urie. Comment un homme dont la grandeur d’âme était si haute – rappelons-nous son attitude envers le roi Saül – comment a-t-il pu se laisser ainsi aveuglé par sa convoitise et sa lâcheté ? De cette faute, ces fautes, David n’en aura pris conscience que grâce au prophète Nathan et à « la parabole du pauvre et de son unique brebis ». (cf Ps 50,1 et 2ème livre de Samuel  chapitres 11-12) David s’est alors sincèrement repenti. C’est là aussi sa grandeur. Il a reconnu sa faiblesse, son péché, il a jeûné, il a prié, il a supplié. Nous sommes dans la même situation.

Notre Eglise a besoin de ce temps de silence, de prière, de prise de conscience de sa faiblesse, de son péché, de se laisser renouveler par le Seigneur. Elle ne doit jamais abandonner son dialogue avec le Seigneur comme le fait le psalmiste. Elle doit s’en remettre à lui. Tout le mouvement du psaume invite à cette remise totale à Dieu qui, seul Juste juge, purifie, lave, efface, enlève, crée. Avec l’Eglise, pour l’Eglise, vivons ce temps devant Dieu.

Joseph Ratzinger a pu parler de la sainteté si peu sainte de l’Eglise (dans son livre : « La foi chrétienne hier et aujourd’hui » p.246) : « C’est vraiment la sainteté du Seigneur qui est présente dans l’Eglise. C’est une sainteté qui éclate et se manifeste comme sainteté du Christ au milieu du péché de l’Eglise. L’extraordinaire interférence de fidélité de la part de Dieu et d’infidélité de la part de l’homme, qui caractérise la structure de l’Eglise, est comme la forme dramatique de la grâce… L’Eglise n’est-elle pas simplement le prolongement de cette insertion de Dieu dans la misère humaine, n’est-elle pas simplement la continuation de la communauté de table avec les pécheurs, de cette solidarité qui lui fait partager la détresse du péché au point de s’anéantir en elle ? Dans cette sainteté si peu sainte de l’Eglise ne voit-on pas se manifester, en face de l’attente humaine de pureté, la véritable sainteté de Dieu, qui est amour, un amour qui ne se tient pas à distance dans une pureté intouchable, mais qui se mêle à la boue du monde pour la surmonter ? J’avoue que pour moi cette sainteté si peu sainte de l’Eglise a quelque chose d’infiniment consolant. Car ne faudrait-il pas désespérer devant une sainteté qui serait immaculée et ne pourrait agir sur nous qu’en jugeant et en brûlant ? » 

Notre Eglise est dans la boue, nous sommes dans la boue, le Christ est dans la boue. Le Christ sur la Croix a payé le prix fort pour tous les péchés du monde, pour les péchés de l’Eglise, pour mes péchés. Son cœur a été à jamais brisé, car toujours ouvert aux souffrances et aux détresses des hommes. Jésus est en agonie jusqu’à la fin du monde. Il est venu sauver tous les hommes, tous. Comme nous y invitait Mgr de Germay, lors de l’Office du vendredi saint de cette année, : « n’hésitons pas à passer aujourd’hui du temps en silence devant la Croix. N’ayons pas peur de dire à Jésus : ‘Seigneur, donne-moi la grâce de m’approcher de ta croix, de communier à ta Passion, de me laisser toucher par cette preuve d’amour.’ Sommes-nous prêts à faire cette prière ? »

L’oraison psalmique peut nous aider et éclairer notre prière : « Dieu de miséricorde et de pitié, nous le comprenons en regardant la croix où ton Fils s’est fait péché pour nous, tu n’aimes que pardonner, tu ne veux que sauver. Vois nos esprits brisés, nos cœurs broyés de repentir ; purifie-nous tout entiers de nos fautes ; renouvelle-nous dans la joie de l’Esprit Saint : nous pourrons alors acclamer ta justice et parler de ton amour à nos frères. »

Abbaye de Pradines, texte sur le rapport CIASE

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