Le NOTRE PERE
« Comme nous l’avons appris du Seigneur »

Abbaye de Pradines Week-end oblats 12 – 13 mars 2022

Miniature du monastère de Dionysiou,
Sur le mont Athos, peinte à Constantinople vers l’an 1059

« Le Christ se tourne vers le Père. Il prie seul, dans un lieu désert.
Ses disciples le regardent à une respectueuse distance.
Pierre, le chef des apôtres, se tourne vers les autres
et leur indique Celui qui est le Maître et le Chemin
de la prière chrétienne : « Seigneur, apprends-nous à prier. »

Présentation du Catéchisme de l’Eglise catholique.
Quatrième partie – La prière chrétienne.

 

 

Mais délivre-nous au mal
La dernière demande du Notre Père reprend l’avant-dernière, en lui donnant une
tournure positive ; c’est pourquoi les deux demandes sont intimement liées. Si, dans l’avant-dernière
demande, la négation dominait (ne pas donner de l’espace au mal au-delà de ce qui est
supportable), dans la dernière demande nous venons au Père avec l’espérance centrale de notre
foi : « Sauve-nous, rachète-nous, libère-nous ! » C’est enfin la demande de rédemption. De quoi
voulons-nous être rachetés ? La nouvelle traduction du Notre Père dit « du mal », sans
distinguer entre « le mal » et « le Malin », mais en fin de compte, les deux sont indissociables.
Oui, nous voyons devant nous le dragon dont parle l’Apocalypse (chap. 12 et 13). Jean a dépeint
« la bête qui monte de la mer », des sombres abîmes du mal, avec les attributs du pouvoir
politique romain. Ainsi, il a donné un visage très concret à la menace à laquelle étaient
confrontés les chrétiens de son temps : la mainmise totale sur l’homme, qu’instaure le culte
impérial, érigeant et faisant culminer le pouvoir politique, militaire et économique dans une
toute-puissance totale et exclusive. Voilà la forme même du mal qui risque de nous engloutir,
allant de pair avec la décomposition de l’ordre moral par une forme cynique de scepticisme et
de rationalisme. Face à cette menace, le chrétien du temps de la persécution fait appel au
Seigneur comme à la seule puissance en mesure de le sauver : délivre-nous du mal.

La dernière demande nous ramène aux trois premières. En demandant d’être délivrés de
la puissance du mal, nous demandons, en fin de compte, le Règne de Dieu, nous demandons de
nous unir à sa volonté, de sanctifier son nom. Certes, les hommes de prière ont eu, de tout
temps, une vision plus large de cette demande. Dans les tribulations du monde, ils demandaient
aussi à Dieu de mettre fin aux « malheurs » qui dévastent le monde et notre vie.
Cette manière tout humaine d’interpréter la demande est entrée dans la liturgie. Dans
toutes les liturgies, à l’exception de la liturgie byzantine, la dernière demande du Notre Père est
développée par une prière particulière qui, dans la liturgie romaine ancienne, disait : « Délivre
nous de tout mal, passé, présent et à venir. Par l’intercession… de tous les saints donne la paix à
notre temps, afin que par ta miséricorde nous vivions toujours libres du péché et assurés dans
toutes nos épreuves. » On sent l’écho des nécessités dans les temps troublés, on perçoit le cri
qui réclame une rédemption complète. Cet « embolisme » par lequel on renforce dans les
liturgies la dernière demande du Notre Père montre l’aspect humain de l’Eglise. Oui, nous
pouvons, nous devons demander au Seigneur qu’il délivre le monde, nous-mêmes et les
hommes, et les peuples qui souffrent en grand nombre des tribulations qui rendent la vie
presque insupportable.

Benoît XVI – Jésus de Nazareth
Flammarion – 2007

Abbaye de Pradines Week-end oblats 12 – 13 mars 2022

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